TRANSITION ÉNERGÉTIQUE | Le SIEGE 27 contribue au débat de la Stratégie Française sur L’Énergie et le Climat

En février, le SIEGE 27 a contribué au débat de la Stratégie Française sur l’Énergie et le Climat organisée par le Ministère de la Transition écologique lors de la première phase de consultation. Découvrez ci-dessous la contribution du syndicat.


LES AODE, DES ACTEURS LOGISTIQUES ADAPTÉS AU DÉVELOPPEMENT ET À L’ACCEPTATION SOCIALE DU LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE

Initiée en 1906, réaffirmée en 1946, la compétence d’Autorité Organisatrice de la Distribution d’Energie (AODE) a constitué le champ d’élection de la coopération intercommunale « logistique » en ce qu’il s’agissait de trouver la bonne synthèse entre l’exercice de la démocratie locale (accès des citoyens à l’énergie dans des conditions satisfaisantes du point de vue social) et l’efficacité des systèmes de distribution (rationalité technique et logique d’interconnexion) selon Pierre Mendes-France, cofondateur du Syndicat d’Electricité et du Gaz de l’Eure.  Les raisons qui ont guidé sa création ont gagné en pertinence depuis la loi TECV. Outre la péréquation tarifaire et le principe de monopole légal côté opérateur, les AODE sont dorénavant confirmées dans le processus de territorialisation de la politique de Transition Energétique, une obligation légale à laquelle doit correspondre une obligation morale de lui faire produire les conséquences les plus salutaires du point de vue social.

Bien que confirmé par la loi TECV, le contrôle des GRD s’expose au raisonnement par filière.

L’abandon progressif des énergies fossiles suppose un transfert de consommation vers les réseaux électriques, gaziers et chaleur à partir d’énergies renouvelables. Au regard des urgences calendaires, toutes les technologies devront être explorées et coordonnées dans une logique d’économie de moyens et d’efficacité.

Sans remettre en cause les raisonnements techniques ou financiers portés par les différents gestionnaires de réseaux sur leur stratégie long terme, le contrôle des investissements n’aura de pertinence que s’il est réalisé à l’échelle territoriale la plus adaptée. À titre d’illustration, si le SIEGE peut vérifier la robustesse du réseau HTA à l’horizon d’un PCAET et d’un programme pluriannuel d’Enedis, il repère déjà d’importants indicateurs de risque sur le réseau basse tension malgré une politique d’investissement agressive destinée à améliorer la qualité de la distribution électrique.

Instituées par la loi TECV, les Commissions Consultatives Paritaires de l’Energie (CCPE) ont en charge d’organiser la cohérence des investissements consentis sur les réseaux d’énergie. Or, l’important travail fécond réalisé depuis 2015 par ces commissions est encore trop absent des raisonnements par filière mis en œuvre par la PPE. L’impact sur l’amortissement des équipements préexistants ou envisagés pèse alors sur l’usager-contribuable, caution réelle de cette norme comptable intangible.

D’où l’intérêt de placer les AODE au cœur du dispositif logistique de la transition énergétique dans les territoires.

S’il féconde la cohérence des politiques énergétiques locales, le portage de la solidarité territoriale doit compter sur un socle de valeurs nationales instable.

La garantie d’un accès équitable au réseau (6 fois plus de linéaire de réseau par abonné en secteur rural) repose alors sur un dispositif de solidarité territoriale fondée d’abord sur la péréquation tarifaire, socialement irréfragable. Il s’appuie ensuite sur la mutualisation des coûts et des ressources, encouragée par le législateur via plusieurs mécanismes stimulant l’activité des AODE. L’évolution de la taxe communale sur la consommation finale d’électricité en une dotation à compter de 2023 constitue alors un indicateur de risque, comme suggéré récemment par le Conseil des Prélèvements Obligatoires (CPO).

La garantie d’une répartition équitable des impacts de la transition énergétique sur les territoires passe aussi par la mutualisation des moyens. La faculté pour les collectivités locales, notamment les AODE, de participer à la gouvernance de sociétés de production d’énergie renouvelable ouvre des perspectives novatrices dans l’équilibre relationnel villes-campagnes.

Lorsque le gisement est collectif (soleil, vent, chaleur profonde), la capitalisation publique dans les sociétés de projet et d’exploitation EnR est de nature à limiter les situations de blocage sociétal, à faciliter la maîtrise des espaces territoriaux, et sanctuarise à l’échelle locale la ressource financière via le versement de dividendes. L’ingénierie technique développée par les AODE et leurs excroissances est totalement adaptée sous réserve que le législateur stabilise sa doctrine en la matière. Or le mécanisme introduit en 2015 a été modifié à plusieurs reprises depuis 2018 et l’article 70 de la loi 3DS ne facilite pas son appropriation par les autorités locales.

Lorsque le gisement est privé (déchets industriels, agricoles, biomasse …), l’investissement public local doit se concentrer sur l’interconnexion des réseaux de façon à élargir le spectre des usages et/ou la coordination entre les réseaux d’énergies afin d’éviter les redondances d’investissement. Force est alors ici de constater que les délibérations de la CRE, alignées sur les objectifs de la PPE, ne facilitent pas le développement de la filière biométhane et du mix énergétique. Directement concernées, les périphéries rurales ne trouvent pas encore d’utilité sociale au développement de la filière en ce qu’elles ne reçoivent ni contrepartie financière, ni la certitude que le développement de la production et des usages du biogaz agricole assurera la promotion de l’économie circulaire.

L’ancrage territorial des AODE au service d’une stratégie bas carbone réaliste.

La transition énergétique repose sur un bouquet diversifié et complémentaire de politiques publiques. Fondée sur l’articulation entre le citoyen et le consommateur, entre la régulation et le marché, l’efficacité démocratique  doit être mobilisée à tous les échelons dans une logique collaborative.

Améliorer le partage des compétences

La mobilisation susvisée suppose de préciser qui exerce le pouvoir de décision d’une part et qui assure la tâche d’exécution d’autre part :

• Décider si la tâche doit être accomplie et selon quelles modalités renvoie à des effets de débordement (la tâche est-elle limitée au public-cible?), des besoins de coordination et d’uniformité (normes éthiques ou techniques) ;

• La production de services correspondants suppose d’examiner les économies d’échelle (effet-taille de la collectivité sur le coût du service) et le besoin de proximité.

En matière de mobilité électrique par exemple, le SIEGE 27, en étroite collaboration avec les EPCI, a conclu que la mission d’opérateur d’infrastructures (IRVE) avait besoin d’uniformité. Par construction, l’interopérabilité des infrastructures de recharge est restée publique, permettant à l’usager d’avoir une claire visibilité sur la tarification (intermédiation financière notamment), et au consommateur de choisir les services de mobilité les plus adaptés à son besoin (rôle des opérateurs de mobilité et/ou des collectivités de proximité). Le déploiement attendu de bornes de recharge électrique rapides suppose de repenser la question au niveau local et national avant que l’investissement public ne soit capté par l’intermédiation marchande, au risque d’exaspérer l’usager-consommateur dans un contexte électrique inflationniste.

Renforcer l’évaluation des politiques publiques dans une logique prospective.

Les conférences instituées par la loi NOME ont pour finalité d’examiner les investissements des concessionnaires et des AODE dans une logique bilancielle et prospective. Après quatre années de travail local, le législateur a souhaité dans un objectif d’harmonisation nationale     les traduire en un Comité du Système de la Distribution Publique d’Energie (CSDPE) pour, au moins, le secteur électrique. Lieu de partage entre les objectifs nationaux et les contextes locaux d’intégration des politiques de transition énergétique, le CSDPE a déjà souligné l’importance - et la difficulté - de l’articulation entre les ambitions nationales et les enjeux territoriaux. Il indiquait dans son avis relatif au projet de PPE que la coordination des réseaux dans leur complémentarité n’y était pas suffisamment abordée, et que l’ambition de multiplier les IRVE réinterrogeait le rôle des acteurs, les modes de financement, et les modalités d’un développement cohérent entre les territoires.

Étendues à la filière gazière depuis 2011 (et pourquoi pas demain aux réseaux de chaleur), ces conférences départementales jouent un rôle d’évaluation ascendant indispensable aux choix qui devront être opérés demain en matière de transition énergétique. Les mécanismes de marché des usages et la durée d’amortissement des réseaux d’énergie (électricité, gaz, chaleur) nécessitent une approche locale qui doit être consolidée au niveau national. Le SIEGE 27 défend l’idée que les investissements d’aujourd’hui doivent admettre les usages de demain. Ce n’est pas encore le cas chez Enedis (au moins sur le réseau Basse Tension) et le droit à l’injection de biogaz n’autorise pas GRDF à développer le mix énergétique. La territorialisation de l’action de l’État en région à la manière de France Relance en 2020, mériterait d’être envisagée de telle sorte que la Région, les EPCI, et les acteurs logistiques de type AODE aient un interlocuteur identifié, sachant reconnaître la puissance du bloc public local à participer pleinement à la transition énergétique.

L’utilité sociale au secours des évolutions technologiques et comportementales.

La production d’énergies renouvelables, le développement du véhicule électrique et de la rénovation bâtimentaire, l’évolution des modes alimentaires, influencent les comportements - parfois négativement - des citoyens-usagers-consommateurs, anthropologiquement accrochés à un espace vécu. En matière EnR, le riverain essentiellement rural attend des compensations plus immédiates que l’amélioration de la qualité de l’air ou la souveraineté énergétique. Le maquis de la tarification de la recharge électrique et les décisions récentes sur l’indemnité inflation enlèvent au signal Prix sa mission première  d’égaliser l’offre et la demande. Sans un aménagement fiscal, la collecte des biodéchets à la source pèsera sur l’usager-contribuable concerné. D’où la nécessité de traduire ces obligations légales en des obligations morales de leur faire produire les conséquences les plus socialement pertinentes pour le citoyen.

Parmi les outils, il y a bien entendu la collaboration en réseau et le partage des compétences telles qu’évoquées ci-dessus, tenant compte de la diversité des territoires et des acteurs concernés, de la juste compensation du monde rural et du besoin du monde urbain, de l’équilibre entre l’usager et le consommateur …

Il y a aussi l’économie de moyens puisque l’acceptation de l’impôt est au cœur du baromètre social, comme le rappelait il y a peu le CPO, jugeant utile de déroger au principe de non-affectation des recettes de façon que l’impôt conserve une utilité sociale.

Il y a enfin le droit à l’expérimentation. En matière de mobilité, l’utilité sociale de la filière biogaz est quasi immédiate puisque la technologie GNV est mature et l’initiative publique/privée locale au rendez-vous: le consommateur bénéficierait du mix énergétique grâce au réseau nécessaire au raccordement des unités de biogaz et l’usager, notamment agricole, échapperait à la taxe carbone.  De même, la thermolyse de la biomasse permettrait d’élargir les débouchés de l’hydrogène décarboné au chauffage. Tous les domaines peuvent être concernés dès lors que le contribuable citoyen a respectivement la certitude (soit l’engagement politique) ou la conviction (qui ne connait qu’un seul ennemi, l’opportunisme) que l’impôt est mobilisé à bon escient et la garantie démocratique que son espace vital est respecté.


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